Le versant Sud de l’Himalaya vit au rythme des moussons. Calendriers agricoles, fêtes religieuses, pèlerinages, mariages… Toute la vie dépend de ces masses d’air chaud et humide qui, de juin à septembre, arrivent de l’océan Indien. La partie orientale de la chaîne, située juste en face du golfe du Bengale, reçoit de plein fouet ces entrées d’air maritime. En quelques semaines, les précipitations colossales atteignent couramment les quatre mètres, dépassant par endroits les dix mètres. En allant vers l’ouest, les précipitations sont moins abondantes mais leur violence reste tout aussi destructrice. Un des derniers épisodes catastrophiques fut en Juin 2013 la dévastation de la vallée de Kedarnath, une des 4 sources du Gange: 5748 morts ou disparus. Certains de ces corps furent retrouvés à Rishikesh à 200 km en aval; d’autres flottèrent au fil de l’eau jusqu’à Allahabad, 800 Km plus loin.

Si ces orages de début de mousson ont toujours été redoutés, les paysans du versant sud guettent cependant avec beaucoup d’espoir les premières pluies. Celles-ci viennent des nuages qui se forment sur les montagnes. C’est la raison pour laquelle les habitants de l’Himalaya voient dans ces montagnes le siège de divinités bienfaitrices, généreuses qui envoient aux hommes les pluies nécessaires à leurs cultures, indispensables à leur survie.

Le versant sud devient pour quelques semaines le théâtre du renouveau de la vie. Dans chaque vallon bruisse un torrent. Les forêts se gorgent d’eau. Les riziculteurs peuvent enfin irriguer leurs rizières. Grâce à l’abondance de l’eau, au savoir-faire et à l’opiniâtreté de ces populations montagnardes, l’occupation humaine sur ce versant  des pluies est devenue spectaculaire. Il n’est  pas rare que la densité humaine dépassent les 400 Hab/ Km² cultivé; sans apport d’engrais chimique ni de pesticide, sur des terroirs où, à l’origine, rien n’est plat et où il est encore le plus souvent impossible d’avoir un vrai terrain de football.

Grâce aux pluies de la mousson, les vallées et collines himalayennes, promises à un fort isolement, ont en fait attiré un grande diversité de peuples. Pour tous, la mousson est vécue comme une période ambigüe, où la joie et le tragique peuvent se côtoyer. C’est une saison incertaine où les démons rôdent, suffisamment puissants pour déstabiliser le monde. À la fin de la mousson a lieu Dasaïn, la plus grande fête de l’année. Pendant dix jours, on célèbre la victoire de Durga sur les forces du Mal.

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